L’assemblée générale de l’association CAPER Bourgogne (Comité amiante prévenir et réparer) s’est tenue jeudi 16 mai 2019, en présence de Me Hélène Aveline du Cabinet d’avocats TTLA.
Les thèmes et enjeux abordés ont été évoqués dans un article publié dans Le Journal de Saône et Loire:
Eternit n’est pas la seule entreprise en cause
Une procédure pénale au point mort
Depuis vingt ans, la procédure pénale lancée contre les anciens dirigeants d’Eternit n’a pas abouti. Les juges d’instruction estiment qu’on ne peut pas désigner un responsable puisqu’il n’est pas possible de déterminer la date précise à laquelle l’amiante a été inhalé par les victimes. Ils semblent s’orienter vers un non-lieu qui n’a pas encore été prononcé. Cet attentisme fait bondir le Caper (Comité amiante prévenir et réparer) : « On a l’impression qu’ils essayent de gagner du temps, jusqu’à ce que tous les dirigeants de l’époque soient décédés », se désole Jean-François Borde, président du Caper.
Eternit et les autres
Si ses anciens salariés ou leurs veuves représentent environ 70 % des adhérents du Caper, Eternit n’est pas la seule entreprise concernée par l’amiante en Saône-et-Loire. Certains adhérents ont été employés dans des entreprises existantes ou ayant disparu : les forges de Gueugnon, la fonderie d’Autun, Kodak, Creusot Loire, Bitulac (peinture amiantée, à Épinac), Honeywell (ancien Sofraf, à Saint-Forgeot). L’association compte aussi dans ses rangs d’anciens agents de la SNCF.
Amiante et pesticides
Lors de l’assemblée générale du Caper, jeudi à Paray-le-Monial, les adhérents ont adopté une modification des statuts qui fait suite au changement, l’an passé, des statuts de l’Andeva (Association nationale de défense des victimes de l’amiante). Dorénavant, le Caper pourra défendre toutes les victimes de maladies professionnelles et environnementales et pas seulement celles dues à l’amiante. Des convergences sont apparues avec des associations œuvrant contre les produits chimiques et pesticides. Traduction concrète : le président du Caper représentera l’Andeva à l’assemblée générale de l’association Phytovictimes, le 25 mai à Fontaines.
Le Journal de Saône et Loire
18 mai 2019
Des victimes collatérales parmi les proches
« Tous les ateliers étaient contaminés, assure un ancien employé d’Eternit qui a souhaité garder l’anonymat. Un jour, j’ai montré la poussière présente un peu partout à un visiteur de l’usine qui posait des questions sur l’amiante. Peu de temps après, un chef est venu me dire que nous n’avions pas à répondre aux visiteurs. »
Les anciens salariés d’Eternit ne sont pas les seuls à avoir été touchés par l’amiante. Certaines de leurs épouses sont décédées des suites de maladies liées à cette substance, alors qu’elles n’avaient jamais travaillé sur le site. L’origine de ces décès, selon le Caper (Comité amiante prévenir et réparer), est liée au fait que ces femmes étaient chargées de nettoyer les tenues de leurs maris. C’est en manipulant les bleus de travail de façon régulière, jusqu’au milieu des années 1970, qu’elles ont inhalé de l’amiante.
Autres personnes qui, selon notre témoin, étaient en contact très étroit avec cette substance dangereuse : les bateliers qui la transportaient dans leurs péniches depuis la Belgique.
Le président du Caper, Jean-François Borde, confirme une autre source de contamination à l’extérieur du site industriel : plutôt que d’être détruits, des sacs de jute ayant contenu de l’amiante ont longtemps été utilisés pour emballer des pommes de terre vendues aux ouvriers. Encore une preuve que le caractère éminemment dangereux de cette matière a très longtemps été caché à ceux-là mêmes qui la manipulaient tous les jours…
Le Journal de Saône et Loire
18 mai 2019
L’experte
« L’association a changé son fusil d’épaule »
Hélène Aveline, avocate du Comité amiante prévenir et réparer (Caper) Bourgogne
« Il y a un revirement de jurisprudence du tribunal des affaires de Sécurité sociale (Tass) de Mâcon : nous observons que les montants des indemnisations ont baissé de façon drastique, surtout pour les taux d’incapacité de 5 et 10 %. Le Tass estime que le capital versé indemnise tous les préjudices et n’accorde une majoration que si des éléments de preuves complémentaires sont apportés.
C’est pourquoi l’association a changé son fusil d’épaule : nous avons fait le choix d’orienter l’ensemble des dossiers d’abord vers le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva) et d’aller ensuite devant le Tass en limitant nos demandes à la majoration de la rente.
Concernant le préjudice d’anxiété, un salarié dispose de deux ans pour déposer un dossier à compter du moment où le site est classé amiante. Il y a une nouveauté depuis un tout récent arrêt de la Cour de cassation, qui date du 5 avril : même un salarié n’ayant pas travaillé sur un site classé amiante peut bénéficier de l’indemnisation pour préjudice d’anxiété. La Cour a ainsi rappelé un principe du droit français : si la faute de l’employeur est établie, tout préjudice donne droit à indemnisation. »
Le Journal de Saône et Loire
18 mai 2019
Amiante : « On vit dans la peur que ça se complique »
Georges Lapandry et Gilles Janiaud sont membres actifs du Comité amiante prévenir et réparer (Caper) Bourgogne, qui a tenu son assemblée générale jeudi à Paray-le-Monial. Aujourd’hui septuagénaires, ces anciens salariés de l’usine Eternit témoignent.
«On ne peut pas faire ce que l’on veut. En plus des effets de l’âge, on est limité dans nos efforts. Lorsque vous prenez une simple angine ou une petite bronchite, vous avez tout de suite peur d’avoir quelque chose de plus grave… Et quand vous voyez des collègues partir… » Le préjudice d’anxiété, revendiqué par les membres du Comité amiante prévenir et réparer (Caper), Georges Lapandry sait ce que cela signifie.
Cet habitant de Paray-le-Monial a travaillé à l’usine Eternit de Vitry-en-Charollais pendant presque quarante ans, entre 1960 et 1999. À 72 ans, il affiche une belle prestance. « C’est ce que vous voyez à l’extérieur, mais à l’intérieur, moi je sais ce qu’il y a… » Dans sa cage thoracique, des « plaques pleurales » (*) ont été diagnostiquées.
Le retraité ne souffre heureusement pas, pour l’instant, de pathologies plus graves comme le cancer bronchopulmonaire ou le mésothéliome (cancer de la membrane entourant les organes). Mais l’amiante à laquelle il a été exposé durant toute sa carrière représente une épée de Damoclès dont la plupart des quelque 500 adhérents du Caper Bourgogne ressentent la présence. Une menace mise à exécution pour au moins 145 de ses anciens collègues d’Eternit, dont le décès a été attribué avec certitude à une exposition à l’amiante.
Longtemps, Georges Lapandry n’a pas été conscient de ce danger potentiellement mortel, qu’il a pourtant côtoyé durant des décennies. « Un jour, un médecin d’une soixantaine d’années m’a avoué que déjà, pendant ses études, on leur parlait des risques liés à l’amiante. Plein de gens savaient, mais nous, en bas de l’échelle, on ne nous disait rien, on bossait. » Autre souvenir, qui avec le recul prend un tout autre relief : « Lorsque les personnels de direction visitaient l’usine, ils ne s’éternisaient jamais dans l’enceinte de production… Maintenant, on comprend mieux pourquoi. »
Plein de gens savaient, mais nous, en bas de l’échelle, on ne nous disait rien, on bossait. Georges Lapandry
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